Certains des pouvoirs de coercition de la Chine n’ont pas encore été utilisés vis-à-vis des États-Unis :

  • La vente de bons du Trésor américains

En se départant de bons du Trésor américains, la Chine pourrait faire augmenter les taux d’intérêt américains, ce qui serait nuisible autant à la Bourse américaine qu’à l’activité économique américaine.

Aux mois de mars et d’avril 2018, la Russie a vendu pour 47 milliards de dollars de bons du Trésor américains à échéance de 10 ans pour voir l’impact que cela aurait sur les taux d’intérêt américains. Elle a dû les vendre moins cher qu’elle les avait payés, donc à rabais, ce qui a fait augmenter le rendement des bons du Trésor américains de 10 ans par 35 points de pourcentage.

La Chine détient au-delà de 1 000 milliards de bons du Trésor américains. Imaginez si elle décidait de vendre pour 10 fois le montant de bons du Trésor qu’a vendu la Russie. Elle les vendrait à perte, évidemment, mais cela pourrait faire augmenter les taux américains possiblement de 2 à 3 points de pourcentage. Ouf ! Cela serait très perturbateur pour l’économie américaine, en plus d’avoir un impact plus que négatif sur l’investissement ainsi que sur la confiance des entreprises et des consommateurs. Et il ne faut pas oublier l’impact sur le refinancement d’une partie de la dette américaine.

  • Les éléments rares

Environ 80 % des besoins des Américains en matière d’éléments rares (il y en a 17) proviennent de la Chine, qui produit environ 80 % du total des éléments rares au monde. Les autres 20 % proviennent surtout de la Russie, du Vietnam et du Brésil.

Ces éléments rares entrent dans la production de batteries (ordinaires et de voitures), dans la production de puces, de mémoires d’ordinateur, le raffinage du pétrole, les moteurs électriques, les micros, les écouteurs, la fabrication de fibres optiques, les fertilisants en agriculture, les DEL, les avions-chasseurs, dans certains produits en soins de santé, etc.

La Chine pourrait priver les firmes américaines de ces éléments rares, ce qui aurait un impact sur la fabrication de milliers de produits américains, priverait les consommateurs américains de ces produits, créerait des pénuries de produits chez les revendeurs sans compter les milliers de mises à pied qui en découleraient. Xi en a fait allusion à un moment donné et le lendemain, Trump, qui venait de « bannir » Huawei, a tout de suite accordé le prolongement de 3 mois d’un certain répit à Huawei et les sociétés connexes…

  • L’imposition d’une taxe sur les ventes agrégées

Trump parle du déficit commercial d’environ 550 milliards avec les autres pays dans le monde et de 330 milliards avec la Chine. Cependant, au niveau des ventes agrégées, les Américains ont des surplus mondiaux totalisant près de 1,5 milliard de dollars. De cela Trump n’en parle pas. Quelle est la différence entre un déficit commercial et un surplus dans les ventes agrégées ?

Supposons qu’une firme installée et fabriquant aux États-Unis exporte pour 100 milliards de dollars de produits vers la Chine et n’importe rien. Cela figurera comme un surplus commercial américain de 100 milliards de dollars. Cependant, si cette firme américaine ne produit pas aux États-Unis, mais à partir d’usines installées en Chine et vend pour ce même montant de 100 milliards de dollars de produits en Chine, cela ne figurera pas comme étant 100 milliards de dollars d’exportations américaines vers la Chine.

Ce sera comptabilisé comme faisant partie de ventes agrégées de 100 milliards de dollars avec la Chine. En fabriquant à partir d’usines en Chine plutôt qu’à partir des États-Unis et en vendant aux mêmes Chinois, les exportations américaines vers la Chine viennent de diminuer de 100 milliards de dollars, mais les ventes agrégées viennent d’augmenter de 100 milliards.

Selon Bloomberg Intelligence, 65 % des exportations de la Chine vers les États-Unis proviennent de firmes américaines installées en Chine. À titre d’exemple et toujours selon Bloomberg, la production de GM en Chine contribue à 25 % de ses ventes totales et à 12 % de celles de Ford. Les tarifs américains pénalisent donc aussi les firmes américaines installées en Chine.

Selon un rapport publié par la China International Capital Corp. en 2015, les firmes américaines installées en Chine vendaient pour 482 milliards de dollars de produits aux Chinois, mais les firmes chinoises installées aux États-Unis vendaient pour 26 milliards de dollars. Les ventes agrégées nettes sont de 456 milliards de dollars en faveur de la Chine, ce qui annule le déficit commercial avec les États-Unis, selon les données du commerce international.

La Chine pourrait émettre une taxe spéciale sur les profits des firmes américaines installées en Chine, mais pas assez élevée pour les faire fermer ou pour faire perdre des emplois. Seulement assez pour compenser en partie les tarifs imposés par les Américains sur les produits chinois.

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Guy Mineault

Guy Mineault Ph.D

Jeune, j’ai été économiste avec General Motors au siège social à Oshawa en Ontario et j’ai aussi travaillé pour la CIBC au siège social à Commerce Court Toronto. Par la suite j’ai enseigné au niveau universitaire pendant 32 ans en économie, en finance et en placements.

Depuis 1994, je donne aussi des formations et des conférences en économie et en placements. Elles sont accréditées avec la CSF, l’IQPF et l’IIROQ. J’ai aussi fait plusieurs émissions de télévision, des webinaires et de courts vidéos sur les placements en fonds.

Il y a six ans j’ai été co-fondateur du MIDIF, (Mouvement d’information et d’aide aux investisseurs en fonds). Cet OSBL se veut de démythifier et démystifier des propos parfois exagérés dans l’industrie ou de demi-vérités. Il y a aussi une FAQ d’une centaine de questions sur la thématique. Vous y trouverez aussi une application mobile qui vous permet d’évaluer la performance d’investissement de vos fonds ou portefeuilles maison.

En 2010 j’ai écrit et publié un livre « Réussir ses placements sans les subir ». Ce livre s’adresse autant au conseiller en épargne collective qu’à l’investisseur averti. Il permet de voir comment choisir ses fonds selon l’approche fondamentale.

Depuis 2014, et avec la participation d’autres, il a conçu un outil de travail qui s’appelle « Kolortrak ». Ce logiciel est simple d’utilisation et très puissant. Il permet d’analyser et d’évaluer des fonds et des portefeuilles maison selon une approche innovatrice. Au moment ou j’écris ces lignes, l’investisseur a le choix de 37800 fonds différents, 56 catégories, 11 sous-secteurs et 210 familles de fonds et sans compter les nombreuses régions. Il est facile d’utilisation et il permet de choisir ses fonds parmi ses pairs. Il y a aussi une application mobile qui permet de voir la performance de ses fonds. Vous pouvez trouver cela sur le site « Kolortrak.com ». Vous y trouverez aussi 11 heures de vidéos de formation sur l’économie, la bourse et les placements.

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